Le fils de Saul

Le fils de Saul

Format carré à l’image pour le film de Lazlo Nemes. Plans serrés, caméra épaulée, l’histoire circule à travers un camp d’extermination nazi.

Saul est hongrois. Belle langue, lui dira un officier dans une scène tendue à l’extrême. Saul est de l’équipe qui draine les prisonniers nouveaux arrivants vers les douches mortelles. Un équipe d’hommes qui vident les poches des vêtements laissés à la patère. Qui trient les bijoux et les trafiquent parfois, qui jettent les papiers et tout ce que les manteaux recèlent dans des boîtes. Qui empilent robes, pantalons, manteaux et chemises à saturation dans les hangars du camp.

Après la mort des prisonniers, des hommes qui portent, traînent et charrient les cadavres, les empilent eux aussi. Jusqu’aux fours. Qui nettoient le sol souillé, les salles puantes. Rechargent au besoin en charbon dans une atmosphère brûlante…

Très vite, le film donne à comprendre l’organisation méthodique. La vie d’ouvriers harassés, déshumanisés par l’horreur du travail accompli, où l’être n’existe plus qu’à l’aune de la charge de travail qu’il représente pour ceux qui sont encore vivants. Des ouvriers recevant des ordres avec violence, pressés sans relâche par les SS et les Kapos.

Peu de mots échangés entre ces hommes, quelques femmes dans leur univers lorsqu’ils passent dans leurs baraquements.

C’est un portrait sans concession de l’extermination industrialisée. Assorti de la brutalité qui donne à comprendre que cela n’a été possible qu’avec le renfort d’une main-d’œuvre esclavagisée, sans intérêt aux yeux des donneurs d’ordres.

Et la folie naissante de Saul lui fera braver les dangers. Porté par un but obsessionnel qui conservera sa part de mystère, il cherche à enterrer un cadavre.

Dans cette barbarie, la vie tient malgré tout et le désir de fuir un lieu où tous savent leur mort imminente. Quand plus rien n’a de valeur, surtout pas l’être humain, l’instinct de survie est la force qui reste. Loin de se résigner, les forçats de la solution finale finiront par s’échapper du camp de la mort pour une brève traversée dans une nature outrageusement luxuriante.

Dans le rôle de Saul, Geza Röhrig est époustouflant, comme l’ensemble des acteurs de ce film. Et le parti-pris esthétique du plan serré, qui donne à percevoir, en arrière-plan, sans exhiber l’absolue cruauté des situations, permet d’endurer un film âpre, douloureusement touchant.

Le Fils de Saul a obtenu le Grand Prix du festival de Cannes 2015.

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