Tension d’été

Tension d’été

Soleil fort. Ciel nuageux. Intense chaleur de fin d’après-midi.

Dans les rues, les pavés sombres chauffent les semelles, les murs hauts renvoient la chaleur dont les pierres sont gorgées. L’ombre se fait rare. Malgré le passage de camions citernes arrosant le pavage d’une nuée d’eau vaporisée, la température reste difficilement supportable. À la terrasse des cafés, quelques ventilateurs égrennent des goutelettes qui s’envolent sous la puissance de l’air. Clients ravis de cette fraîcheur pourtant fugace. Au restaurant, d’aucuns peinent devant leur assiette de goulash ou autre spécialité de viande fumée garnie de quenelles de pommes de terre.

Le ciel s’assombrit. Une masse nuageuse étire rapidement sa grisaille en forme de fer à cheval. Le centre historique se voit bordé de sombre menace. L’air fraîchit. Les premières gouttent tombent sur le gravier du parc Wallenstein. Sur les feuilles des tilleuls. Sur l’herbe verdoyante. Sur la fontaine et ses bancs de pierre. Sur la Vltava, plus loin, qui étire ses bras et ses îlots à travers la ville.

Un vent violent se lève subitement. En contrebas du pont Charles, l’eau de surface est balayée d’ondes irrégulières. Beauté du mouvement. Vertige face au déchaînement des éléments en pleine ville.

Traînés par un bateau à moteur, des pédalos rentrent à la base. Plus haut, les vendeurs de tableaux et de figures croquées au fusain remballent en urgence.

Bousculée en rafales, la pluie tombe dru. Le ciel est noir. L’air glacé. Les badauds qui profitaient des quai, du spectacle de la ville offerte au tourisme de masse quelques minutes auparavant, courent sur le pont. Des cris. Des mouvements brusques. Des corps bousculés par les bourrasques, des vêtements trempés. Des sourires et des éclats de rire aussi.

Le vent souffle maintenant sans discontinuer et la pluie l’accompagne. L’ambiance est apocalyptique. L’orage bat son plein.

La tempête laissera des arbres meurtris. Tilleuls aux branches arrachées. Troncs à l’écorce pelée. Au pied du château, les pommiers jetteront au sol leurs fruits encore verts. Le parc royal fermera pour réaménagement d’urgence. Les tronçonneuses s’activant dans les nombreux parcs de la ville pour arranger les dégâts causés par un été quelque peu outré.

Ici, le dérèglement climatique rend les journées plus chaudes, année après année. Les Praguois le disent.

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