Tension au comptoir

Tension au comptoir

Ambiance tendue dans l’équipe bar restaurant de la place. Quinze minutes avant dix-neuf heures, il s’agit d’avaler son dîner parce qu’ensuite ce sera le service du soir, le coup de feu nocturne peut-être. Un mardi qui ressemble aux autres.

Carrelage blanc à mi-hauteur de murs, peinture noir mat en remontant vers le plafond. Banquette grenat, contour de bar assorti, zinc martelé à l’ancienne. Ambiance industrielle. Fenêtres hautes tournées vers la place et sa cathédrale aux pierres de taille roses. Pas à Toulouse pourtant.

Dans le décor, les serveurs s’opposent aux cuisiniers. La pause a démarré trop tard, une fois de plus ce soir. Eux, les gars de la salle, doivent manger à vive allure avant de reprendre leur service. L’un d’eux, chemise noire, quitte la table excédé. Il est trop énervé et le dit. Pas envie de dîner en cette compagnie. Avec ceux qui n’en ont rien à foutre d’eux, en salle. Ceux qui peuvent manger à leur guise, en cuisine, quand cela leur chante, mais contraignent les autres à leur rythme, deux repas par jour.

Chemise noire installera son assiette frites pata negra et verre d’eau au bar, dos à la salle. Il ignore ceux, tabliers gris, qui ont attisé sa colère.

Le jour s’apaise tandis que les rues distribuent des voitures phares ouverts. Dehors, l’air fraîchit, un thermomètre clignotant vert le dit à proximité. Ambiance musicale de fond funk, un verre de bergerac rouge servi un peu trop froid. La salle se remplit au fil des courants d’air distribués à l’ouverture de l’une des deux portes vitrées.

Wifi très forte, trop, elle le sent dans ses gencives qui tiraillent, sa bouche salivant pour tenter de compenser le tapage des ondes.

Elle parcourt la carte et s’étonne qu’un dessert, ici, coûte la moitié du prix d’un plat de viande avec accompagnement. À peine un euro cinquante de moins qu’une salade composée ou un plat figurant aux entrées.

En tirant la porte d’entrée vitrée, elle a su dès lors que ce serait le lieu d’un verre. Un verre apéritif, celui qui ouvre l’appétit. Elle ne dînera pas dans cet établissement. Après avoir marché quasiment une heure en visite de la ville, montées descentes virages, montées descentes virages, elle cherchait une crêperie qu’elle a trouvée. C’est là qu’elle ira savourer une galette de sarrasin garnie — une au moins.

D’ailleurs il est temps maintenant.

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