Nymphomaniac

Nymphomaniac

Au générique de fin de son tout nouveau film, Lars von Trier remercie Andreï Tarkovski dont on comprend, dès les premières images, l’héritage. Après une mention de censure peu compréhensible sans autre contexte, le film commence par une scène vide, écran gris dans le silence pendant près d’une minute.

L’entrée se fait par un décor froid. Gros plan d’eau qui ruisselle le long des murs, briques, poteaux, métal rouillé, labyrinthe de murs extérieurs, nuit. La caméra se déplace lentement sous la neige éparse. Ramstein, Fühle mich, débarque dans la bande son, puis un corps ensanglanté posé sur le sol d’une cour glaciale. Plongée dans l’obscur.

Nymphomaniac, un film en deux parties de deux heures, se regarde comme on lit un livre, cette portion déroulée en 5 chapitres. Entre narration théâtrale et scènes de récits de mémoire, deux protagonistes se répondent, partagent leurs points de vue autour de questions de pêche et leur analogie avec celles de sexualité. Une femme se raconte à un homme. Livre les affres de sa sexualité à celui qui l’a recueillie. Son visage est tuméfié. Elle était allongée inconsciente dans la cour au début du film.

Décor sinistre aux murs moisis pour ce huis clos dont le réalisateur nous extrait par les flash-back qui retracent la quête d’une femme se prétendant nymphomane, mauvaise personne. Chaque chapitre est annoncé à l’écran dans une variation typographique. Les scènes narratives ponctuées d’incursion d’images comme on lirait un encadré encyclopédique.

Loin des 10 commandements du Dogme95 qu’il a impulsé avec Thomas Vinterberg, il semble que le réalisateur s’amuse des possibilités techniques de découpage ou de jeu d’images. Parfois didactique, savant, hyper référencé et particulièrement original, le film est aussi cru, ses scènes de sexe sans ambages ni gros plans affriolants n’en sont pas moins explicites. On apprendra au générique qu’aucun des acteurs professionnels n’a subi de pénétration pendant lesdites scènes…

Faisant fi de la chronologie, Lars von Trier fait dire à Joe — Charlotte Gainsbourg — qu’elle reviendra ultérieurement sur certains points. Dans son histoire, il s’agit de filiation et de transmission, de découverte, de sexe, de quête, de défi à relever, du refus de l’amour. Du sens de la vie. Du besoin frénétique qu’ont certains des autres, de la peur du vide, d’une insurmontable solitude, de la fuite de ce qui se joue dans la relation amoureuse, du dégoût du bonheur. De la peur de vivre.

Le film s’arrête alors que Joe raconte qu’une fois l’amour — enfin — rencontré, éprouvé sexuellement, le plaisir l’abandonne violemment.

La deuxième partie du film sera sur les écrans le 29 janvier.

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