Ishmael

Ishmael

Ishmael, l’ouvrage de l’éco-philosophe et futurologue Daniel Quinn, est aujourd’hui épuisé. Le livre se vend à vil prix sur le marché de l’occasion. De quoi s’agit-il ?

À la suite d’une annonce relevée dans la presse : Professeur cherche élève souhaitant vraiment changer le monde, un trentenaire se met en chemin. Ledit professeur n’est autre qu’un grand singe, un gorille installé dans un immeuble, dont on ne sait s’il est doué de parole ou d’auto-suggestion à son élève. Un dialogue s’instaure entre les deux hommes qui balaient quelques grandes questions du monde. Car changer le monde, c’est avant tout le comprendre. Pointer ses dysfonctionnements et ce qui peut évoluer.

Le professeur interroge son élève sur le sens des mythes humains. La mythologie et la genèse venant justifier les imperfections humaines et la violence qui en découle, les humains conçoivent que l’homme, cet être supérieur créé par des dieux à leur image, est au monde pour le modeler à sa guise.

Ishmael est le nom du professeur. Ses propos ébranlent l’élève venu appprendre à sauver le monde, car le mode d’emploi n’est pas tout à fait évident.

Sur terre, Ishmael dénombre deux catégories d’êtres humains : Ceux-qui-laissent et Ceux-qui-prennent. Nous, Occidentaux, sommes bien évidemment parmi Ceux-qui-prennent, c’est-à-dire, ceux qui s’arrogent. Ceux qui décident, s’agissant d’humains ou d’espèces, de nature ou de territoire, qui a le droit de vivre ou pas.

« Le monde à été confié à l’homme pour qu’il en fasse un paradis, mais celui-ci n’a cessé de le saccager car il est fondamentalement imparfait. Il aurait pu y remédier s’il avait su comment vivre, mais il ne le sait pas et ne le saura jamais […]. Si vous n’avez rien d’autre à jouer que cette histoire désespérante, il n’est pas étonnant que parmi vous, tant de gens s’adonnent aux drogues, à l’alcool ou à la télévision. Ni qu’un si grand nombre d’entre vous deviennent fous ou se suicident. »

La sagesse d’Ishmael apporte quelques clés quant à la façon d’être au monde, au-delà de la croyance en notre suprématie, dans une voie qui semble encore inaccessible à bon nombre d’humains. Pour lui, aucun prophète n’est utile ou nécessaire pour dicter à l’homme sa conduite et le déprendre de son libre-arbitre. L’homme encadre, édicte des lois contournables, décide de réprimer l’utilisation des drogues par exemple. Mais la vie, la façon de vivre sur terre ne peuvent souffrir cette théorisation. La seule façon de vivre sur terre devrait, à l’évidence, pouvoir se décréter dans tous les aspects incontournables qui permettent la vie et son maintien. Il s’agit de procéder de façon empirique, par observation du monde vivant — dont l’humain est une infime partie. Observer permet la compréhension, ce dont privent les dogmes, les mythes, les lois, parfois.

Pourtant, certains observateurs ont déjà lancé l’alerte, mais n’ont guère été entendus. Tant que l’être humain théorisera sa supériorité sur les autres espèces, il sera en difficulté pour concevoir ses propres ravages, accepter sa capacité à détruire — à commencer par lui-même — et mettre en place son propre changement.

À l’opposé de Ceux-qui-prennent, Ceux-qui-laissent se savent de passage sur Terre. Ils sont conscients que leur tradition remonte aux premiers temps. Ils ne se débarrassent pas du passé qui appartient à leur présent et leur culture rassemble des données accumulées depuis des millénaires. Quand ils transmettent les usages qui conviennent à leur peuple, Ceux-qui-prennent, persuadés détenir la meilleure façon de vivre en leur temps, transmettent du savoir théorique, technique, sur la façon de produire des objets, de meilleurs objets.

« Si nous continuons, ils n’y aura pas de successeurs à l’homme, pas de successeurs aux chimpanzés, aux orang-outangs et aux gorilles. Pas de successeurs à tout ce qui vit actuellement sur terre. Tout va mourir avec nous. Pour rendre leur histoire vraie, Ceux-qui-prennent devront mettre un point final à la création elle-même. Et ils en ont pris résolument le chemin. »

Chers éditeurs, serait-ce le moment pour une réimpression de l’ouvrage ?

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