Barrage de Sivens, au-delà des affrontements

Barrage de Sivens, au-delà des affrontements

Depuis plus de cinq semaines, les opposant.es au barrage et les occupant.es de la zone à défendre de Sivens subissent les assauts quotidiens des forces de l’ordre — quelques pauses durant le week-end. Alors que les opposant.es revendiquent leur pacifisme, les violences policières sont doublées d’insultes systématiques.

Il semble que la ténacité de la résistance surprenne les politiques. Refusant encore le débat contradictoire, en dépit des demandes répétées des grévistes de la faim — 38 jours pour certains —, ils ont choisi la voie de la violence et du discrédit pour tenter de casser la mobilisation.

Si cette lutte symbolique d’un nécessaire changement de paradigme est d’abord passée inaperçue au-delà des réseaux de protection de la planète, force est de constater que de plus en plus de personnes sont maintenant informées de la situation. Bientôt peut-être remercierons-nous le président Carcenac d’avoir œuvré dans ce sens. Pensant attenter à la réputation des opposant.es, gagner l’opinion locale et se rallier le territoire, il a fait distribuer un courrier diffamatoire, évitant avec hardiesse le sujet de fond : le bien-fondé du projet de barrage. Massivement distribué en publipostage dans les villes proches du site de Sivens, ledit courrier a singulièrement popularisé l’opposition. On pourra se féliciter de l’effet contreproductif de cette dispendieuse tentative de désinformation, elle-même augmentée de publicités du conseil général dans les pages du journal local La Dépêche.

Dorénavant, les gens d’ici sont au fait ce la situation et des exactions que subissent les contestataires. De la tentative anti-démocratique de passage sans concertation, menée par l’équipe politique qui a décidé le démarrage en force des travaux, sans attendre les rendus de justice. D’aucuns ont parfaitement lu entre les lignes du président Carcenac et ont transmis le courrier à ceux qui ne l’avaient pas reçu. D’autres ont cherché à comprendre et le Net est ici un précieux relais pour recevoir des informations émanant du terrain de résistance par le site des Bouilles, et celles étayées, critiques et constructives du collectif de sauvegarde du Testet.

Cependant certains demeurent farouchement opposés aux opposant.es — le contraire eut été étonnant, nous sommes en zone rurale et agricole. Lorsque la conversation peut s’engager, rien ne vient étayer leur propos sinon la désinformation qu’ils ont crue vérité. Quelques mots plus tard, ils doutent de ce qu’ils avaient compris, réfléchissent à leur positionnement et promettent de se renseigner. Certains tentent de propager des rumeurs usant d’une méthode qui ne va pas sans rappeler les heures sombres de l’histoire : répandre et pointer du doigt l’autre, l’étranger responsable de tous les maux de l’époque, l’ennemi à éradiquer. Dans le lot des violents, certains sont redoutables tel le maire d’une petite commune de proximité assénant à un opposant distribuant des tracts au marché du vendredi matin à Gaillac, devant témoins : Toi, c’est une balle dans le dos.

Je pourrais décrire longuement ce qui se passe dans la vallée de Sivens, après la destruction expéditive de la forêt : les journalistes agressés par les gardes mobiles ; mardi matin, cette femme traînée au sol par son foulard noué autour du cou, qui se relève et reçoit un coup de pied dans le dos par les gardes mobiles ; celles et ceux qui annoncent leur pacifisme et étouffent sous les lacrymogènes, les balles assourdissantes, les coups, les insultes des gardes mobiles. Chez les opposants, les blessures et fractures sont légion. Un blessé est à déplorer dans l’autre camp.

Au-delà de ces affrontements, il s’avère que les solidarités vont croissant, que l’information circule, que les mots et les actes d’encouragement et de soutien vont augmentant. La lutte gagne chaque jour du terrain dans les esprits du Tarn et passe les frontières.

À Sivens, au-delà des affrontements, c’est l’enjeu de l’avenir qui se cristallise dans ce combat pour la préservation d’une zone écologique indispensable. C’est l’insolence d’une jeunesse avertie qui milite pour la prise de conscience collective et ne se fait guère d’illusion sur la probité en politique. Une jeunesse qui tient tête à de vieux usages anti-démocratiques, à des baronnies qu’elle récuse. Qui dénonce le double discours des politiques les portant à signer des Agenda 21 tout en continuant à massacrer la planète.

À l’extrême opposé des forces de l’ordre harnachées et entraînées, les résistant.es de Sivens n’ont que leur peau, leur détermination et leur conviction, pour se protéger des coups. Humilié.es et brutalisé.es, leur vie fréquemment mise en danger, leurs demandes de débat ignorées, elles et ils ne lâcheront pas. Pour défendre la zone, pour initier la transition énergétique indispensable, elles et ils iront jusqu’au bout. Et seront massivement soutenus.

Il est grand temps d’écouter la sagesse d’un peuple éclairé. Son combat est noble. Il porte des idéaux majeurs pour l’avenir de la démocratie et la préservation de la planète.

Une manifestation est prévue samedi 4 octobre à Gaillac, à 15 h, place de la Libération.
Un grand rassemblement « Enracinons la résistance ! » est programmé sur site le 25 octobre à midi.

 

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