Course poursuite

Course poursuite

Ils sont sept. De cet âge étrange où il est difficile de choisir entre fille ou femme, garçon ou homme. Six pour une. Des adolescents. Une bande aux cheveux gel-hérissés, allure soignée stéréotypée. Elle cheveux longs, raie au milieu.

Leurs gestes sont brusques, ils chahutent. Des cris, de l’agitation. Elle se débat contre l’un d’entre eux. Empoignade. Roulade dans l’herbe. Des cris encore. Les bagarreurs se relèvent. Lui volontiers provocateur. Elle rassemble ses cheveux, les passe vers l’arrière. Elle court après lui qui s’enfuie en zigzaguant à travers le square au milieu des passants.

Les autres les regardent sourires en coin. Se croient au stade et encouragent leur équipe. Sifflent entre leurs doigts. On les dirait jaloux de celui qui est poursuivi.

Puis l’un s’empare du sac à main de la jeune femme resté au pied d’un tilleul. À peine dissimulé derrière l’arbre, il fouille avec ardeur. Extrait une partie du contenu qu’il montre aux spectateurs. Les objets passent de main en main. Sans gêne. Trésor de bataille. Rires de connivence. On exhibe ce qui n’est pas à soi.

Une femme cheveux gris s’arrête à leur niveau. Sans un mot elle les observe, son mouvement suspendu. Celui qui est à la fouille recule derrière le tronc. Les autres regardent l’étrangère avec un air ahuri. Elle les fixe à les mettre mal à l’aise. Les interpelle. Leur demande s’il apprécieraient qu’elle vienne fouiller dans leur pantalon, là, maintenant, sans leur permission. Ils se moquent d’elle, de sa voix, reprennent sur le même ton qu’elle avec des « gna gna gna » plein la voix. Elle insiste. Dit leur lâcheté. Qu’un sac à main c’est privé. Que ce qu’ils font est pathétique. Six contre une. Pour qui vous prenez-vous ? Des tout-puissants ? Mais vous êtes de moins que rien à fonctionner ainsi. La loi du lus fort, vous croyez encore à ça ? Personne n’est fort ici. Vous êtes plus nombreux c’est tout. Vous vous imposez et c’est consternant.

Les adolescents ne disent plus un mot, cependant que les bagarreurs passent et repassent, vols de moineaux, l’une coursant l’autre.

La femme poursuit son chemin sans un regard en arrière.

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